Une histoire de durs à cuir

Le 30 novembre dernier, le monde apprenait que le port de veste en cuir était interdit en Corée du Nord. Kim Jong-un décrétait qu’il serait désormais le seul à pouvoir porter ce vêtement, agacé de voir son peuple se l’approprier. Mais n’en déplaise au dictateur nord-coréen, ce fameux blouson possède une histoire qui démarre bien avant son règne.

Mythique sur James Dean, sulfureuse sur Brando : la veste en cuir est depuis ses débuts le symbole du parfait rebelle. L’histoire raconte que la maison américaine Schott crée le perfecto en 1928 pour répondre à la demande de l’entreprise Harley-Davidson qui cherche une pièce permettant de protéger ses clients en cas d’intempérie. Devenu un attribut de choix pour les motards, le blouson en cuir séduit bientôt le cinéma qui s’empare de son style non conventionnel pour équiper ses bad boys à l’écran.

C’est d’ailleurs sous l’influence de films mythiques tels que Rebel Without a Cause ou The Wild One que fleurissent en France dans les années 1950 les fameux « blousons noirs », comme les nommera en 1959 France Soir. Ces jeunes avides de sensations fortes font l’apologie du macho, du loubard, du motard, du hors-la-loi : une image symbolisée par le port de leur veste en cuir noir, mais aussi par les artistes qu’ils écoutent. Elvis, Eddie Cochran, Jerry Lee Lewis… des rockers dans l’âme jusqu’au revers de leurs cols cloutés. On est dans l’ère du Swinging London où s’opposent les Mods et les Rockers, et évidemment, les durs à cuire se tiennent dans la seconde catégorie, celle qui inspire aussi la mode, et en particulier un visionnaire destiné à une carrière légendaire : Yves Saint Laurent. Alors à la tête de la maison Dior, le styliste crée en 1960 le blouson Chicago en cuir de crocodile noir. C’est la première fois que la veste en cuir se fait une place dans la haute couture. Rapidement, elle devient une pièce que les créateurs prennent plaisir à magnifier.

Dans les années 1980, Claude Montana fait même de la veste en cuir son mantra : il la décline dans toutes les teintes, lui donne des épaulettes et en fait le symbole de la working girl. Cette veste, qui grâce au mouvement punk prend une allure anticonformiste, se trouve désormais dans tous les dressings et devient iconique sur le dos des ex-amants Kate Moss et Johnny Depp. Cette pièce mythique a donc plus de quatre-vingt-dix ans d’histoire, de chemins croisés et d’inspirations multiples avant que Kim Jong-un s’en approprie le port, persuadé qu’endosser une veste en cuir serait l’imiter.  

Cheynnes Tlili

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