Partager l'article

Lucas Leffler : photographe expérimental

À l’heure du numérique, il revient aux sources de la photographie. En véritable alchimiste, il fait ressurgir les histoires du passé et utilise la matière pour transformer celles-ci en fables modernes.

Lucas Leffler affirme : « La force d’une photographie, c’est son ancrage dans le réel ». Ce précepte constitue sa ligne directrice, qu’il plonge dans la mémoire du passé ou qu’il joue avec la matière. Venu à la photographie par l’étude de son histoire et de ses techniques, il a découvert sa vocation d’artiste visuel en se lançant dans des pratiques expérimentales. En 2017, avant même d’obtenir son master à l’Académie royale des beaux-arts de Gand (le KASK) deux ans plus tard, il a débuté un travail sur l’industrie de la photographie argentique et ses vestiges. Après avoir exploré l’usine Ilford de Manchester, il s’est intéressé à celle d’Agfa-Gevaert, à Anvers. Dans les archives de l’entreprise, il a exhumé une histoire anecdotique et fabuleuse : pendant près de trente ans, un ouvrier a collecté la boue d’une rivière devenue argentifère suite aux rejets de l’usine, afin d’en extraire le métal précieux à l’aide de procédés ingénieux. Tel un archéologue, Lucas Leffler est parti à la recherche du ruisseau. À partir de la boue extraite du cours d’eau, à laquelle il a ajouté du nitrate d’argent pour la rendre photosensible, il a réalisé des photographies en matière, évoquant le paysage où elle avait été récoltée. Baptisée Zilverbeek – rivière d’argent en flamand – cette mise en abyme a séduit le musée de la Photographie d’Anvers (FOMU) et celui de l’Élysée à Lausanne qui ont fait entrer dans leur collection ces œuvres racontant la mythologie d’un ruisseau. Tout en poursuivant ses tirages à la boue, l’artiste belge se tourne vers d’autres performances artistiques : il expérimente la photographie en chambre noire et imprime des images industrielles sur des tôles d’acier, dont l’oxydation lui offre de nombreuses possibilités plastiques. Avec son projet Crescent, il explore la matérialité de la photographie par le biais du nitrate d’argent, étudiant ses facettes depuis l’extraction minière jusqu’à la réaction chimique d’acido-réduction. De ses cristallisations, il a fait naître une sculpture photographique en constante évolution, symboliquement titrée L’Arbre de Diane, que les alchimistes associaient à l’argent. Avec Lucas Leffler, la photographie entre dans une nouvelle dimension.

https://lucasleffler.com

Lucas Leffler présenté par la galerie Intervalle
Paris Photo – Grand Palais éphémère

Avenue Pierre-Loti, 75007 Paris
Du 11 au 14 novembre

www.parisphoto.com

Biennale de l’image tangible – Galerie Ménil’8
8, rue Boyer, 75020 Paris
Du 16 au 29 novembre

https://bit20.paris/edition-2021/2021-galerie-menil8

Par Sophie Reyssat